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Hydrogène vert : « Japonais, Brésiliens, Saoudiens, tout le monde se pose la question du coût »

Anne-Sophie Corbeau est chercheuse au Center on Global Energy Policy au sein de la School of International and Public Affairs de l’université Columbia New York.
Honnêtement, il y a peu de projets qui avancent concrètement. En 2021, un grand nombre de cabinets de consultants et d’institutions avaient vendu l’hydrogène bas carbone comme la solution miracle, mais force est de constater que c’est plus compliqué qu’il n’y paraît. Que l’on discute avec des Japonais, des Brésiliens ou des Saoudiens, tout le monde se pose la même question : celle de la demande, en raison du coût élevé de cette source d’énergie.
Pour mener à bien leurs projets, ces pays ont besoin de plusieurs milliards de dollars pour investir dans des électrolyseurs à l’échelle de plusieurs gigawatts. Or, les banques ne vont financer que les cas qui ont du sens et des garanties. D’où la nécessité de passer des accords de long terme avec des acheteurs et de trouver des solutions, comme le fonds allemand H2Global ou la Banque de l’hydrogène en Europe, pour diminuer l’écart entre le coût élevé de l’hydrogène décarboné et le prix que les acheteurs sont prêts à payer.
Oui, tout le monde en ce moment se tourne vers l’ammoniac comme vecteur d’importation. Les Japonais veulent en mettre dans les centrales à charbon pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les ports de Rotterdam et d’Anvers s’équipent pour en importer. Car on sait faire. Il existe déjà un marché de l’ammoniac pour la production d’engrais, des terminaux portuaires, et le transport est plus simple que pour l’hydrogène liquide. De même que l’on pourra davantage compter sur le méthanol pour le secteur maritime et les e-carburants pour l’aviation, que l’on sait aussi déjà transporter.
Les industries énergo-intensives, comme la sidérurgie, font, elles, face à un dilemme : soit importer de l’hydrogène (cher) soit un produit industriel semi-fini comme le minerai de fer préréduit, solide et facile à transporter. Pour l’Union européenne, un des dangers serait que des produits élaborés, comme de l’acier vert, soient fabriqués ailleurs. Car ceux-ci seraient en règle vis-à-vis du mécanisme européen d’ajustement aux frontières.
Pour l’instant, seuls l’Europe et, en Asie, le Japon, la Corée du Sud et Singapour envisagent réellement d’importer de l’hydrogène. Il y a moins d’acheteurs potentiels qu’il n’y en a pour le gaz naturel liquéfié (45 en 2022). La Chine fera-t-elle partie du lot ? Je ne le pense pas, sauf si elle est contrainte de déployer de l’hydrogène bas carbone sur la côte est. Les Chinois sont relativement absents des échanges diplomatiques. Jusqu’à présent, les accords qu’ils ont noués avec dix pays se font au travers de la « nouvelle route de la soie » et concernent surtout des projets d’hydrogène vert et d’équipements.
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